Le costume du moyen âge dérive des costumes antique et gaulois. De ce dernier,
il a gardé, pour les hommes, l' usage de braies (caleçon, pantalon ou culotte,
de toile ou de cuir maintenu à la taille par une ceinture, le braiel) (les femmes
n' en portent point, et, à la campagne, ont continué à n' en point avoir, jusqu'au
début de ce siècle) et, pour les deux sexes, le bliaud que le monde élégant laissera,
au xiiie siècle, tomber en désuétude, mais qui se conservera cependant jusqu 'à
nos jours dans le costume paysan : c' est la blouse. Le vêtement féminin a toujours
été long; celui des hommes, court, sauf lorsqu' il s' agissait de costumes de
cérémonie ou liturgiques, imités de l' antiquité, s' allongea vers 1140,
malgré les critiques des moralistes (une telle mode leur paraissait efféminée),
et se raccourcit à nouveau à partir du milieu du xive siècle, en dépit de nouvelles
censures incriminant cette fois l' indécence de vêtements qui épousaient
les lignes du corps. Seuls, à cette époque, restèrent fidèles à la robe longue
les gens qui se devaient d' être graves : prêtres, professeurs, médecins,
hommes de lois. Et ils y sont demeurés attachés : les premiers, pour les cérémonies
du culte, les autres quand ils professent dans les Facultés ou paraissent au Tribunal.
Entre 1180 et 1340, le costume du moyen âge a présenté sa plus grande beauté,
qui vient de la simplicité des formes et de leur parfaite adaptation au corps
humain, ainsi qu 'aux matières employées : étoffes épaisses ou fines, dont on
laisse jouer les plis. Hommes et femmes sont alors vêtus à peu près de la même
façon : à même la peau une chemise à manches longues, tombant jusqu 'à
la cheville pour les femmes, et jusqu 'à mi-mollet pour les hommes. Elle
fut d' abord d' étoffe de laine (serge) et le resta chez les pauvres gens
et les moines. Mais bientôt l' usage de la toile, fine ou grosse, se vulgarisa,
et au x,XIVe siècle devint si courant que sous Charles V un valet de ferme normand
peut laisser à sa mort un trousseau de 13 chemises. Les gens soigneux changent
de linge tous les quinze jours. On porte même des chemises de soie. Par-dessous,
les femmes qui tiennent à leur silhouette - la mode est aux poitrines hautes -
se serrent dans un voile de mousseline que l' on épingle par derrière et
qui est un véritable soutien-gorge. Quand elles se trouvent trop plates, elles
fixent en bonne place des pelotes « en forme de pommes d' orange».
Sur la chemise, on passe le doublet, gilet piqué et ouaté, puis
la cotte qui est une robe longue, largement évasée vers le bas.
Par-dessus on enfile le surcot qui se prête à une grande variété
de formes, de longueurs, et de matières. Parfois c' est un vêtement
aussi long que la cotte, parfois une simple jaquette, avec ou sans manches, fourrée
pour l' hiver mais single (sans doublure) pour l' été, garnie ou
non de passementeries, de fourrures, de broderies. Certains sont fendus sur le
côté, d' autres ont des manches amovibles, de couleurs assorties
ou contrastantes. La mode exerce ses fantaisies sur la manche qui laisse parfois
voir celle de la chemise, parfois au contraire est si étroitement ajustée
jusqu'au poignet que l' on doit la fermer par une série de boutons, ou
même la coudre chaque fois que le vêtement est enfilé... Des
surcots faciles à laver, analogues à des sarraus et sans manches
se passaient sur les vêtements pour aller à table : ils tenaient
lieu de serviettes.
Parfois l' on se serrait le buste et le ventre dans un gilet matelassé
et piqué : le garde-corps ou corset, à l' origine du vêtement
actuel de même nom.
La ceinture peut être brodée ou orfévrée. Mais elle
est le plus souvent de cuir. L' on y pend couteaux, clefs, outils ou écritoire,
bourse. Le tablier ne fut en usage qu 'à la fin du xive siècle.
Le vêtement de sortie était, comme de nos jours, le manteau, avec,
ou plus souvent sans manches, muni ou non d' un capuchon, fermé sur la
poitrine par une agrafe, simple crochet ou bijou travaillé. La forme du
manteau médiéval subsiste dans la cape de l' infirmière,
de l' agent de police... Notre pèlerine, comme son nom l' indique, est,
elle aussi,d' ancienne origine : c' était le manteau, fort pratique, des
pèlerins et voyageurs. Le manteau d' hiver était souvent fourré de lapin
ou d' écureuil, ou de pelages plus précieux. Contre la pluie, l' on portait
des chapes à aigue, imperméables, en laine non dégraissée. Pour le cheval, l'
on avait des manteaux ronds, les cloches, fendues devant et derrière. Le manteau
pouvait être brodé, orné de queues de fourrures disposées autour du bord inférieur,
ou Placées en senus sur l' étoffe. La bienséance voulait qu' on retire
son manteau quand on paraissait devant un seigneur, et cette marque de politesse
était due par les femmes comme par les hommes. Les pieds et les jambes, quand
on n' allait pas pieds nus, étaient couverts de chausses (le nom s' est conservé
en Haute-Bretagne pour désigner les bas). Elles étaient tricotées ou faites d'
étoffe exactement taillée, à la manière de nos guêtres, et maintenues
par des jarretières tricotées, voire brodées. Les chausses étaient parfois « semellées»,
ce qui évitait de mettre une autre chaussure, au moins pour l' intérieur.
Sinon, l' on portait des souliers faits souvent d' étoffe ou de cuir souple,
et, pour l' hiver, des chaussons fourrés. Quand il fallait sortir, l' on mettait
des brodequins épais, en cuir de vache, et cloutés, des sabots, ou des bottes,
et l' on complétait parfois la tenue de houseaux de cuir ou de guêtres. Pour la
coiffure, les femmes gardaient les cheveux longs. Elles les tressaient en nattes
queues n' hésitaient pas à grossir de postiches, empruntés à des cadavres,
au grand scandale des prédicateurs. Ces tresses, d' abord flottantes, furent relevées
en cornes ou en cadenettes sur les oreilles, enserrées dans une résille, massées
en chignon sur le cou... Les jeunes filles, au moins quand elles étaient en costume
de fête, portaient les cheveux flottants (et la Vierge est souvent représentée
de cette façon, en signe de sa virginité, dans les tableaux anciens).
Cette coiffure est encore conservée en certains de nos pays, notamment
à Ouessant. L' homme qui, au XIIIe siècle, se rasait complètement le visage
comme de nos jours, se faisait couper les cheveux sur la nuque et en relevait
l' extrémité en rouleau. L' élégant se faisait friser
au petit fer. Pour maintenir sa chevelure ou en masquer l' absence, il usait d'
un petit bonnet à trois pièces (conservé dans les béguins de bébé jusqu 'à
notre époque). Les femmes mettaient un serre-tête de lingerie, laissant voir les
cheveux, ou, si elles étaient dénuées de coquetterie, âgées, veuves ou dévotes,
une ample guimpe enserrant le visage, couvrant parfois le menton, dissimulant
un cou qui pouvait être flétri, et retombant sur la poitrine. Elle se conserva
sous d' innombrables variantes, souple ou empesée, dans maints costumes monastiques.
Par-dessus le bonnet ou la guimpe, on porte à l' occasion un voile (pour les femmes
exclusivement), un chapeau ou un chaperon (pour les deux sexes). Le chapeau est
en paille pour l' été: conique, ou plat, à larges bords, adapté
à son usage qui est de garantir du soleil. Pour l' hiver, il est en feutre, généralement
en forme de cloche, avec, au sommet de la calotte, un petit ressaut en bouton,
analogue à la ficelle qui s' érige au milieu de nos bérets basques. Il
est, pour les fêtes, souvent remplacé par une couronne d' orfèvrerie ou
de fleurs, qui est encore de nos jours, la coiffure des mariées. Les élégants
mettaient des chapeaux de plumes de paon. Quant au chaperon d' étoffe de
laine, souvent doublé d' un tissu, voire d' une soie de couleur claire,
il a connu pendant deux siècles et jusqu 'à la fin du xve une vogue
durable et les plus grands caprices de forme. Les costumes universitaires d' Europe
(France non comprise) en ont gardé une riche variété d' exemplaires.
Femmes et hommes l' ôtaient pour saluer. Le vêtement était complété par
des gants, d' étoffe ou de cuir, dont le moyen âge fit grand emploi. Les
dames en brodaient, les seigneurs s' en faisaient offrir pour redevances féodales.
Jeter son gant était un défi, offrir son gant, signe de donation. Les chasseurs
portaient leurs autours ou leurs faucons sur leur poing couvert d' un épais
gant de cuir. Les paysans avaient des moufles cuirées pour enlacer les ronces,
barbelés naturels, en palissades. Comme les ouvriers américains, les maçons portaient
des gants de travail dont les comptes nous révèlent qu 'ils les usaient par douzaines.
Le costume médiéval, si bien compris, si pratique et en même temps si seyant,
pouvait être fort riche, par sa matière ou par son ornementation. Cette recherche
fut d' abord réservée aux vêtements sacerdotaux ou aux costumes d' apparat des
princes. Mais, à la fin du xiiie siècle, les bourgeois rivalisaient d' élégances
ruineuses que des lois somptuaires essayèrent d' arrêter. On voulut aussi
obliger, tantôt les femmes honnêtes, tantôt les « folles femmes », à des mises
sans prétention. Et ces lois furent parfois observées.
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