Troubadour, trouvère, ménestrel, jongleur... autant d' appellations médiévales de musiciens. Mais sont-ils tous les mêmes?

C' est au XIIe siècle qu 'apparaît le terme occitan " trobador ", qui désigne la personne qui " troba ", c' est-à-dire" qui trouve ". Ce mot est lui-même issu du latin " tropus ", qui signifie " trope ", un genre musical religieux utilisé depuis le IXe siècle, originaire de l' abbaye St Martial de Limoges, où l' on rencontre les premiers troubadours.

Souvent issus de familles nobles, les troubadours sont à la fois auteurs et compositeurs de pièces qu 'ils interprètent à la cour à laquelle ils sont rattachés ou invités. Parmi les plus célèbres, on retrouve Bernart de Ventadorn, Raimbaut de Vaqueiras, Gaucelm Faidit, Jaufré Rudel, Raimbaut d' Orange... Ils excellent dans les chants de fin'amor, sublimation de l' amour courtois envers la Dame vertueuse, belle et inaccessible. L' exaltation du désir devient pour eux une quête mystique, et l' érotisme rejoint la ferveur quasi religieuse envers l' Aimée. Les commentaires de saint Bernard (1091-1153) notamment sur le Cantique des cantiques, cantate d' amour mystique à la fois charnel et divin, vont eux aussi en ce sens, développant une théologie du désir, de l' homme jusqu' à Dieu, et invitant à vivre et à célébrer l' amour.

Les seigneurs de la France du nord reprirent les formes et les motifs utilisés par les troubadours : les trouvères célébrèrent à leur tour le fin'amor à partir environ des années 1170. Durant le règne de saint Louis, leur production est particulièrement abondante dans la haute noblesse : Thibaut de Champagne, Gace Brulé, Gautier de Dargies... Les trouvères composent essentiellement de grands chants, des lais et des chansons d' inspiration religieuse : chansons de croisade et chansons à la Vierge. Le corpus de mélodies de trouvères qui est parvenu jusqu' à nous est environ dix fois plus vaste que celui laissé par les troubadours; cette proportion est loin de correspondre à leur création réelle, mais serait plutôt due à la plus grande facilité qu 'avaient les gens du nord de la France quant à la production des manuscrits.

La musique des trouvères comporte beaucoup plus d' écriture polyphonique (plusieurs voix) que celle des troubadours, essentiellement monodique. Elle est aussi beaucoup plus savante, et orientée davantage sur la poésie qu 'elle transporte que sur la mélodie elle-même.

Si les troubadours et les trouvères produisaient essentiellement des poèmes musicaux pour la cour, alors qui jouait lors des fêtes populaires? Les ménestrels et les jongleurs, d' origine beaucoup plus modeste, se chargeaient d' exciter les foules et de divertir par un spectacle que l' on qualifierait aujourd'hui de " variété " à la fois la cour et le peuple. Leur répertoire n' en est pas pour autant musicalement pauvre, car il n' était pas rare qu' un troubadour ou un trouvère donnât de ses compositions à un ménestrel pour les interpréter. Mais de la musique de rue, musique populaire, de celle qui animait les foires et les fêtes, hélas il ne nous reste pas grand-chose, car seule la noblesse pouvait se permettre de faire consigner ses écrits par des copistes professionnels.

Sur quoi alors se baser pour l' exécution de cette musique? Certains éléments ont traversé les siècles, par la tradition orale; toutefois, de génération en génération, de modes en modes, des ajouts ou des déformations ont transformé ces pièces. Pour le musicien moderne, il s' agit donc d' un véritable travail de détective, qui exige une connaissance profonde de l'esthétisme médiéval, et qui consiste à identifier les pièces susceptibles d' appartenir à un répertoire ancien, à dégager les éléments caractéristiques à la période et à tenter de recomposer la pièce dans une forme la plus près possible de l' original. Toutefois, même si nous retrouvons parfois dans la musique traditionnelle des rythmes de danse caractéristiques à une certaine période (branle, sabotée, passepied...) il est absolument impossible de dater avec certitude un air populaire. Il ne nous reste plus qu'à marcher sur le même chemin que les musiciens du Moyen Age, et à re-composer, dans le respect de ses règles, la musique médiévale...

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Quelques instruments médiévaux
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Fond sonore: Quan Vei l'Alauzeta
Disponible sur l' album: Les Musiciens de Provence Vol 1

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